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SOUS LE MASQUE

Exposition virtuelle

À partir d’un travail plastique de moulage de leur propre visage, deux classes du lycée Auguste Perret à Évry-Courcouronnes ont réalisé un portrait d’eux-mêmes en s’inspirant de ce qu’ils vivaient ou aimeraient vivre. Témoignant de leur regard sur le monde, de leur vécu, de tout ce qui les anime ou les révolte, un texte accompagne leur réalisation plastique.

Une présentation aurait dû avoir lieu le jeudi 26 mars 2020 à 18h au Restaurant du Théâtre de l’Agora pour restituer l’ensemble du projet, mais l'épidémie du Covid-19 en a décidé autrement : les élèves, les enseignants et les artistes ont pu se réunir le mardi 9 février pour exposer les masques et les textes au lycée. 

Nous vous proposons cette exposition virtuelle où vous pourrez admirer leurs créations, et pour certain.e.s, écouter les textes.
 


Cicatrice, texte de Ali.

Masque - Est-ce qu’on peut éviter de souffrir ?
Ali - Je pense, oui…
Masque - Comment tu peux dire ça ? Regarde moi, depuis que je suis petit je prends des coups.
Ali - Qu’est ce qui t’est arrivé ?
Masque - Des histoires… Des personnes à qui tu fais confiance et finalement…
Ali - Finalement, tu peux faire confiance à personne.
Masque - Mes proches oui -
Ali - Mais ça se compte sur les doigts d’une main. Moi ce que je pense c’est qu’il vaut mieux « prévenir que guérir », les cicatrices on peut les éviter si on trace sa route en solitaire.
Masque - Parce que ce sont les autres qui nous blessent…
Ali - Si on avance seul, on évite d’être déçu
Masque - Mais tu peux vivre seul ?
Ali - Je compte sur moi, je suis vigilant, je fais attention à tout ce que je fais, parce qu’il n’y a rien de pire que les regrets, et que mon reflet dans la glace ne me renvoie pas mes mauvaises expériences.
Masque - Les cicatrices qui ne sont pas visibles, est-ce qu’elles sont moins dures à porter ?
Ali - Arrête avec tes cicatrices, faut que tu avances, de quoi tu as envie ?
Masque - J’ai envie… de vivre, de profiter, d’être libre, j’ai envie de tout !
Ali - Les envies donnent de la force, et personne ne peut avoir envie pour toi, alors vas-y bouge, arrête de regarder le passé : tu es le seul à pouvoir te faire avancer…





Medley de paroles de chansons de Youssoupha, Le Klub des loosers, Booba, Médine et Pablo Coelho par Damien

Entre poème et vulgarité
J’nique mes rêves et j’crois pas aux chaînes de solidarité
Chacun pour soi
La pression est palpable
Tu crois que ça nous soigne de partager ?

J’me rappelle du jour où j’ai dit « qui m’aime me suive »
Depuis j’attends toujours
Même si personne n’arrive

J’ai fais de l’homme, l’ennemi de mon destin
Parce que le jour où je serai meilleur, il me traitera de chien

Quand t’es p’tit tu crois que les amis c’est pour la vie
Et puis arrive le jour où tu te retrouves dans un puit

J’me fie qu’à mes songes et ma vision, car l’être humain vit de mensonges, d’eau fraîche et d’trahison.

Mille fois j’ai arrêté le rap
Mille fois j’ai recommencé

Quand j’ai trouvé toutes mes réponses
Toutes les questions avaient changées…


 


Texte de David D.

Enfant, on nous raconte des belles histoires pour nous aider à dormir. Les belles histoires restent parfois gravées en nous. Elles nous suivent au delà de l’enfance et peuvent devenir, si on ne les oublie pas, des réalités… C’est l’histoire d’une famille qui vivait au Portugal, sur une petite île isolée. Dit comme ça, ça pourrait faire rêver, mais cette île était très pauvre, les habitants manquaient de tout et souffraient quotidiennement depuis de nombreuses années. Au milieu de cette misère, un jeune garçon passait ses journées à jouer au football, même sans ballon, il jouait avec tout ce qui se trouvait sur son chemin, des pommes, des chaussettes, des canettes vides. Pour lui, c’était le paradis, il ne demandait rien d’autre que de courir avec au bout du pied quelque chose à envoyer dans tout ce qui pourrait ressembler à une cage de foot…

Un jour, sa famille reçut la visite d’un oncle qui vivait à l’étranger. Voyant les talents du jeune, l’oncle lui proposa de l’emmener avec lui et de l’inscrire dans un club pour qu’il puisse s’entraîner. La suite est une belle histoire, le jeune homme était vraiment doué, et très vite il se fit remarquer par des clubs de plus en plus réputés. Petit à petit il montait dans des sphères qui ne lui étaient pas destinées. La pauvreté n’est pas une fatalité pour ceux qui savent utiliser leurs pieds.

Tout n’est pas si facile. La vie ne tient qu’à un fil. Un bonheur n’arrive jamais seul, et une terrible épreuve s’abattit sur le jeune homme. Loin de lui, il apprit la mort de son père, et cette nouvelle le dévasta… Il se sentait mal d’être parti, il avait l’impression d’avoir abandonné sa famille… Mais même dans la douleur, il ne pouvait s’empêcher de jouer, il avait tellement de tristesse qu’il s’entraina encore plus et le souvenir de son père se transforma en force pour l’accompagner dans tous ses matchs… C’est comme ça, qu’il devint le meilleur joueur au monde, avec son père à ses côtés, lui prêtant ses jambes, sa force et sa volonté.

Nos vies ne sont pas tristes ou joyeuses, elles ne sont que ce que nous voulons bien en faire. À nous de décider comment les transformer en belles histoires…




Texte de Florian

Izuku vient d’une autre planète, une planète où certains hommes ont des capacités extraordinaires : des SUPER POUVOIRS.
Izuku lui, n’en a pas, et au milieu de tous il se sent triste, rejeté et surtout inutile…
Il tente de garder la tête haute en continuant d’étudier, il veut réussir sa vie à tout prix, même s’il n’a pas de pouvoir, il essaye d’être fier de lui, même s’il n’est qu’un simple humain.
All-might (ça veut dire : tout est possible, ou toute puissance), All-might donc est un super-héros qui a croisé la route du jeune adolescent en détresse. Pris de sympathie pour sa persévérance, sa volonté et son sens de l’honneur, il lui a fait cadeau de son pouvoir : le ONE FOR ALL.
ONE FOR ALL, ça veut dire un pour tous, Madame Stoikovitch va être fière de moi. Un pour tous, un pouvoir qui le rend vraiment très puissant et qui l’encourage à rendre justice aux plus faibles.

On me demande de dire ce que je pense du monde, moi je me le raconte avec des histoires fantastiques. Les hommes y ont les mêmes qualités, les mêmes défauts mais leurs histoires irréelles me permettent de m’échapper aussi de mon quotidien, d’imaginer qu’on puisse voler, avoir des pouvoirs, être super puissant, s’habiller différemment, avoir 4 jambes, voir derrière la tête…

 Notre monde manque de fantaisie.
Izuku a du courage et il ne baisse jamais les bras, même s’il n’existe pas, il est inspirant pour moi.




Texte de Grégoire

 Texte audio par Grégoire

Sous mes yeux
Le monde est un chaos
Je m’en aperçois comme un boxeur qui prend un coup en pleine figure

Les humains ne pensent pas comme nous qui venons d’une autre planète
Le monde se déchire
Les humains se déchirent
Ils n’amènent que des fléaux
Entre les attentats, les complots, les guerres et les maladies
Cette vie est triste
Cette vie est insupportable
On ne devrait plus utiliser le mot vie mais SURVIE
Ce monde est merdique

Au milieu de ce désert, j’erre, solitaire
Plus rien ne m’intéresse
Tout cela m’est égal
Je garde mon calme au milieu de tous ces bruits
Toutes ces sirènes
Ne m’atteignent plus
Je survis
Et n’ai plus d’envie, ni d’avis…

Non je plaisante
C’est pas moi ça
C’est un personnage que j’aime bien
Mais j’ai pas grand-chose à voir avec lui

Je crois qu’on a toutes les capacités en nous pour faire notre bonheur
Sans chercher à changer le monde
Je crois que les hommes qui abandonnent
sont des traitres envers eux-mêmes
Car quand on naît
On fait comme un pacte avec la vie
Celui de la vivre coûte que coûte
Et de la mener le plus loin possible

Oui, oui… Le monde est dur
Et parfois on n'y comprend pas grand-chose…

Voilà, c’est dit -
Qu’est-ce qu’on fait maintenant ?

Vous avez déjà pêché dans la mangrove ?




Texte de Jean-Yves (inspiré de IAM - Nés sous la même étoile)

 Texte audio par Jean-Yves

La vie est belle
C’est une belle phrase
Moi ?
J’y crois pas
Car les problèmes s’enchaînent

La justice
C’est une belle idée
Mais jamais je l’ai vue se concrétiser

J’ai cru que le monde n’appartenait ni aux riches, ni aux puissants
Mais aux hommes de cœur
Mais croire à cette idée n’a pas fait mon bonheur

Personne ne joue avec les mêmes cartes
C’est toujours les plus puissants qui gagnent
On ne naît pas sous la même étoile
Pourtant on naît dans le même hôpital

Pourquoi pour lui c’est l’équitation, moi les bastons ?
Pourquoi chez lui, c’est des Noëls ensoleillés ?
Pourquoi j’ai du stopper les cours ?

J’voudrais m’en aller, j’voudrais m’en aller, j’voudrais m’en aller
Loin de tous mes problèmes

J’ai fait tout ce que j’ai pu pour éviter de faire souffrir mes enfants
J’ai avancé en faisant des choix
Je sais que vous pourrez les critiquer
Mais des leçons, personne ne peut en donner
Je suis né dans la pauvreté
Pâle de peur devant mon père, mon frère se faisait tabasser
Vivre dans un bidonville tu sais ce que ça veut dire ?
C’est une enfance ? De la pourriture ouais
Les « je t’aime » à mes parents se faisaient rares
Mes cartes à moi elles étaient pas dorées
Et c’est moi tout seul qui les ai colorées

J’voudrais m’en aller, j’voudrais m’en aller, j’voudrais m’en aller
Loin de tous mes problèmes

J’exprime mon avis même si tout le monde s’en fiche
Pourquoi suis-je là, seul, quitté par tous mes proches ?
Une crise égocentrique ? Je l’ai peut-être méritée ?

J’ai choisi une route, pas celle de vos sentiers normés
J’ai du m’armer pour ramasser les billets
Avec de la volonté on s’approche des sommets
Ne fais pas de moi un exemple
Prends ta vie en main, fais-en un spectacle
Deviens-en l’acteur et non la victime

La mienne a pris une mauvaise tournure, j’ai du prendre un virage trop serré
Chacun son boulet, sans ambition la vie c’est trop long
J’ai pas su changer mon destin
Et je suis devenu le voyou qu’ils voulaient faire de moi

J’veux m’en aller
J’veux m’en aller
J’veux m’en aller

… Loin de cette cage où ils m’ont enfermé




Texte de Kilian

Je te présente ma petite voix, la flemme
Je la connais depuis le collège
Avec elle, je n’fous rien de mes journées
Je ne fais que repousser
Demain, j’aurai plein de trucs à faire
Les trucs d’hier, que j’ai pas fait

Mon poil dans la main vous gêne ?
Vous n’arrêtez pas de me critiquer
Mais ça m’est égal
C’est grâce à elle, si je geek sur mon tel toute la journée

Je traîne avec la flemme
Tout le monde la connaît
Et ceux qui disent le contraire
Sont les premiers à l’adorer

De mon côté, si je l’aime
C’est plus par ennui que par nécessité

Tout me fatigue
Et ça vous fait criser
Laissez-moi tranquille
Je vous ai rien demandé

Mes rêveries je sais où les trouver
C’est pas dans vos cases que je vais me ranger




Texte de Levent

Bon, je suis quelqu’un d’heureux
Ma vie, je l’ai choisie
Être ici, je l’ai choisi

J’aime pas travailler dans le bâtiment
Alors j’ai trouvé une place qui me convient
J’ai déjà ma propre entreprise
Où je conduis les travaux
Je fais un peu de comptabilité
Je m’occupe d’une équipe
Je pense que je serai un bon patron

En même temps, on travaille en famille
Je fais tout avec ma famille
Je sors avec mes cousins, je travaille avec mon père, mes oncles
Avec eux, on parle la même langue, turc ou kurde au choix.
Et c’est plus facile que le français
J’aime bien parler plusieurs langues
Mais je peux pas dire que j’aime écrire, dans mon métier ça tombe bien, on parle plus que l’on écrit.

J’ai pas à me plaindre
Franchement
J’ai une grande famille et on est heureux
On a des problèmes
Comme tout le monde
Mais franchement, dans la vie, je préfère voir la joie même quand il y a des peines
J’ai de la chance d’être entouré de mes proches…
Qu’est-ce que je ferais sans eux ?
Au moindre problème, tout le monde est là pour aider

Bon, ici, il y a des choses que j’aime moins
Trop de règles
Trop de difficultés
En Turquie, même sans permis, je conduis et personne vient m’embêter
Ici, vaudrait mieux pas que je me fasse arrêter
Et puis, ici les gens restent chez eux, les restaurants sont souvent fermés
En Turquie, tout le monde est dehors, dans les parcs et tu trouves à toute heure de quoi manger
Chaque endroit est un voyage
À chaque ville sa spécialité, mon pays d’origine est rempli de saveurs
Et c’est fort de tout ça que je construis ma personnalité

Je suis heureux, c’est la belle vie…
Celle que j’ai choisie




Texte de Mael

L’argent ? C’est du papier
Comme ce masque, du papier
Tous les papiers n’ont pas la même valeur
L’argent fait-il le bonheur ?
Pas entièrement mais beaucoup quand même

Et même si on dit qu’il n’a pas d’odeur, moi quand je le sens, ça me laisse rêveur …

Rêver…
Rêver de devenir Pablo Escobar

Allez venez, je vous emmène en voyage !
On commence par la Grèce, vous êtes déjà allés en Grèce ?
Moi non, mais je vois déjà la maison perdue en haut d’une colline, entourée d’arbres et surtout le soleil à toutes les heures de la journée.
Je plonge dans la piscine, je nage jusqu’à la cascade qui descend tout doucement vers la mer… Je me laisse dériver dans les vagues, en faisant la planche sur l’eau…
Ma copine me rejoint en jet ski, le bateau n’est pas loin, on se prépare une soirée au rythme du soleil couchant

L’argent c’est du papier
Et quel papier !
Pablo, c’est un gangster qui a bon fond. Moi, je l’admire, si j’étais comme lui je ferais en sorte que tout le monde puisse s’en sortir et que tout le monde soit fier de ce qu’il fait…
C’est un peu comme Robin des Bois, mais lui il m’inspire pas, les flèches et jouer dans les bois c’est plus d’actualité, faut savoir vivre dans son époque. La mienne, si je la regarde droit dans les yeux, j’y vois des armes à feu et pas mal de mafieux…

On continue ?
On part à Los Angeles, bon là c’est pas des vacances, c’est mon adresse permanente, si vous voulez m’écrire c’est là bas. J’investis dans des entreprises, je participe au développement de l’immobilier et des écoles et des stades… Mes proches autour de moi, chacun sa villa, on a besoin d’espace pour être heureux non ? C’est pas humain de vivre dans nos tours comme des animaux en batterie. Non non, une villa pour tout le monde !
À Los Angeles, j’ai ma famille, une femme, des enfants… On est heureux…

Je vous emmènerais bien aux Maldives pour terminer, à Cuba, à Hawaï… Mais en attendant que mes rêves deviennent réalité, faut que je reprenne les cours et que je gratte sur ce papier.


 


Chemin de vie, texte de Mamadou S.

 Texte audio par Mamadou

Il y a plusieurs chemins dans une vie
Les joies et les souffrances en font partie
La vie est un défi
Un défi pour se lever, pour se maintenir sur ses pieds, parfois tomber, se relever
Tomber mais toujours se relever

Est-ce qu’on peut éviter les chutes ?
Est-ce qu’on peut éviter de naître dans un endroit où rien ne t’est donné ?
Où personne n’a de quoi manger ?
Où les écoles sont soit en grève soit fermées ?

J’étais un enfant plein de vie, de force et d’énergie
Mais ces forces s’épuisent quand elles sont nourries par les larmes et les souffrances
Combien ne se relèvent pas ?
Combien abandonnent ?

J’étais un enfant plein de courage, de détermination
Tu peux m’empêcher de manger
Mais tu ne peux pas m’empêcher d’espérer
Parfois le destin ressemble à une tempête de sable qui se déplace sans cesse.

Pourquoi on part de son pays ?
Pourquoi quitter sa famille ?
Par plaisir, par goût du voyage, pour se changer les idées ?
Tu veux que je te parle de la jolie croisière qui m’a amené jusqu’à ce lycée ?

Je ne te donnerai pas ces détails croustillants pour t’apitoyer
Tu peux me regarder dans les yeux et seulement constater
Que depuis que je suis parti, pour la vie je suis marqué

Je suis un garçon plein de vie, de force et d’énergie
L’espoir fait vivre ?
Oui, l’espoir fait vivre
Ici, je vis, j’étudie, j’ai toutes les cartes en main pour avancer

Je suis un garçon plein de courage et de détermination
Ici il y a tellement plus de possibilités
Ici même seul, les murs peuvent être escaladés
J’ai plein de projets et toute ma force pour les concrétiser

Chemin de vie
À jamais marqué
Le passé et l’avenir
Sont à jamais blessés par ceux que j’ai quitté




Texte de Mustapha

Je ne suis pas quelqu’un de bavard, j’aime pas trop parler à des personnes que je connais pas.
Je ne fais pas confiance aux inconnus. C’est pas ce qu’on dit aux enfants quand ils sont petits ?

Mais je veux bien vous dire en quelques mots ce que je suis.
En un mot plutôt : FIER

Je suis fier, c’est un défaut et une qualité.

Je sais pas pourquoi, si j’ai été blessé par quelqu’un par exemple, j’arrive pas à pardonner, je trace un trait.
Si je dis quelque chose à quelqu’un et que j’ai tort et bien j’accepterais jamais de dire que j’ai tort.
Je ne sais pas pourquoi je suis comme ça. Je m’en rends compte mais c’est comme ça.

Ma fierté c’est aussi grâce à elle que je suis là.
Quand j’étais plus jeune, j’ai commencé à ne plus trop avoir envie d’aller à l’école, à rester chez moi ou avec mes potes pour fumer la chicha. Je voyais bien que ça n’allait pas, que si je continuais je ferais rien de ma vie, ça rendait triste ma famille…
Avec ma fierté, on a décidé de s’en aller, d’aller tenter notre chance ailleurs.
On est partis, sans demander à personne son avis.
Moi et ma fierté on est là depuis 5 ans.
Moi et ma fierté ça fait 5 ans qu’on n'a pas revu notre famille.
Moi et ma fierté, on se réveille tous les matins pour aller au lycée.
Moi et ma fierté on a changé de route pour se prouver qu’on était motivés.
Moi et ma fierté on est bien partis pour y arriver.

Et moi et ma fierté on aimerait bien quand même revoir ceux qui sont restés…




Texte de Samet

 Texte audio par Samet

J’ai grandi à Ararat au Kurdistan, ou Agri en Turquie. C’est à 4197 km d’ici par la terre, et 3342 km par les airs.

À Agri, j’étais bien, j’allais à l’école, autour de moi la vie était tranquille, il y avait tout ce qu’on voulait, beaucoup de champs et d’agriculteurs, plein de possibles…
Je suis né Kurde, un peuple qui n’a pas vraiment de pays, même s’il se bat pour. Et nous sommes nombreux à vivre en Turquie.
Les Turcs ne nous ont jamais aimés. Pourquoi ? Qu’est-ce que j’en sais…

À Agri, les Turcs nous interdisaient de parler notre langue, tous les jours la police, les gendarmes nous oppressaient, s’amusaient à se moquer de nous, nous interdisaient telle ou telle chose…
Moi et ma famille, nous sommes partis pour vivre librement, pour pouvoir nous exprimer librement.

Je fais de la boxe depuis quelques années. J’ai rencontré Luigi, c’est devenu mon prof. Il m’a appris à freiner, à travailler, à utiliser ma force et ma volonté.

On vit tous dans le même monde, mais chacun vit dans son monde. Je ne demande rien à personne. Je suis prêt à vivre le meilleur comme le plus dur. Je sais faire face à la réalité, même si elle n'est pas toujours agréable à regarder. Dans des situations extrêmes je suis capable de me battre pour aider.

On se perd en ayant des idées arrêtées.
Il ne faut pas oublier notre humanité.




Texte de Yilmaz

Garde le sourire quoi qu’il arrive
La meilleure vengeance est le sourire

Utilise ton sourire pour changer le monde, ne laisse pas le monde te changer ton sourire.




Texte de Agilan

 Texte audio par Agilan

Agilan, c’est un beau nom de tigre ça non ?

Le tigre est un animal silencieux, et j’aime bien le silence.
Dans ma vie, il y a très peu de silence.
Le bruit du vent, des voitures, les sirènes de police, la musique, la machine à laver, les gens dans la rue qui parlent fort la nuit, les pas, les oiseaux…
J’aimerais vivre dans un monde plus calme, j’ai du mal à entendre les voix des gens, je trouve qu’ils parlent souvent pour ne rien dire.
Ma grand-mère parle avec des gestes, j’aimerais la comprendre et communiquer comme elle.

Il y a très peu de tigres en liberté aujourd’hui.
On a tendance à enfermer les animaux sauvages, sans se demander pourquoi ils sont sauvages ? Et s’ils sont si sauvages que ça ?
Est-ce qu’ils n’essayent pas seulement de rester en vie dans un monde qui lui EST SAUVAGE ?

Dans mon enfance, je me suis plusieurs fois senti rejeté à cause de ma couleur de peau.
On m’a poussé, insulté…
J’ai eu la HAINE.
Une haine que je ne connaissais pas.
De la violence PURE…
Je ne me suis pas laissé frapper, je ne les ai pas laissé faire. J’ai été violent, sauvage, comme eux l’avaient été avec moi.
Cette haine là, elle est restée en moi. Elle m’aide à me défendre mais parfois elle ressort sur mes proches, sans raison…

On peut donner tous les conseils du monde, certaines leçons ne s’apprennent qu’avec des chutes ou des coups.

J’imagine que j’ai pas fini d’apprendre…
Mais avec un tigre à mes côtés, ça devrait bien se passer.




Texte de Brandon

 Texte audio par Brandon

J’avais 8 ans quand Euresta est arrivé.
J’étais en CE1.
Plusieurs personnes ont commencé à se moquer de moi, de mon apparence, à me frapper dès que je passais à côté d’eux. Ça les amusait je crois.
J’ai jamais vraiment compris pourquoi ils faisaient ça, ce qui les amusait. Moi, ça m’amusait pas du tout.
J’ai essayé d’en parler à mon enseignant, et il les a puni en leur faisant ramasser des papiers dans la cour pour la nettoyer… Là, ça m’amusait un peu plus. Je les voyais râler à ramasser des ordures et ça me soulageait qu’ils souffrent un peu.
Là, c’est Euresta qui parle, Euresta c’est une certaine partie de moi, celui qui a toujours très faim, celui qui joue des heures à des jeux vidéos, celui qui hurle et qui frappe, celui qui écoute pas en cours et qui regarde par la fenêtre, celui qui voudrait casser la fenêtre et partir en courant…
On est plusieurs à l’intérieur de moi, et la cohabitation se passe bien, je me sens plein de puissances, pleins de ressources, pleins de possibilités…
Euresta, il me fait vivre des histoires de super-héros. La nuit, il est jamais fatigué, on sort et plusieurs fois on a déjà vécu des moments complexes, je suis pas le seul a avoir souffert de harcèlement. On a de quoi se battre dans les rues.
Si on meurt pas tous du coronavirus, je crois bien qu’un jour le monde pourrait être différent et que j’aurai moins besoin de me battre… En tout cas, je le souhaite…




Une Belle vie, texte de David T.

 Texte audio par David

Je trouve qu’on n’a pas assez de pause, il faudrait qu’entre chaque heure de cours, on ait 20 minutes de pause. Si ça se passait comme ça, je suis sûr que les professeurs seraient contents car on bavarderait moins entre nous en cours.
J’aimerais qu’on ait plus d’heures d’atelier aussi, pour pratiquer et apprendre mieux notre métier. Le français j’aime bien et l’histoire aussi, mais l’SVT par exemple, ah ! Le corps humain, le sang et tout, ça me dégoûte.

Dans ma classe, je ne changerais rien, c’est bien de ne pas être trop nombreux et de se connaître si bien…

J’ai du mal avec les transports pour arriver à l’heure en cours alors je propose soit de mettre un arrêt de bus en bas de chez moi, soit de créer un campus à côté du lycée où je vivrais et j’aurais juste à descendre de chez moi pour arriver en cours, soit avoir un hélicoptère privé les jours où je n'entends pas mon réveil, ou sinon on invente la téléportation et le problème est réglé.

Je trouve que ce n'est pas normal qu’il existe des écoles privées ou religieuses, on devrait tous aller dans les mêmes écoles, avoir les mêmes cours et avoir les mêmes chances.

On ne devrait pas empêcher les gens de s’habiller comme ils veulent. Laisser les gens décider par eux-mêmes, autoriser le voile partout et pouvoir aller travailler dans son entreprise en jogging.

Dans certaines villes comme Marseille, je mettrais plus de poubelles pour les rendre plus agréables à vivre.

Je mettrais des terrains de motocross dans les villes car on est beaucoup à en faire et quand on habite dans une ville c’est dangereux d’en faire sur du béton.

Je mettrais aussi des voies pour les motos car il y a beaucoup d’accidents sur les routes.

Je supprimerais aussi le « black friday » pourquoi on appelle ça le black friday ? Ça me fait penser à l’esclavage, au jour du marché où avant on vendait des êtres humains…

Et aussi, je supprimerais les zoos et les grands aquariums, je protégerais les espèces dans leurs habitats naturels. En même temps, chez moi, j’ai construit mon propre aquarium où j’ai mis des poissons et ça me plaît. Du coup, je ne sais pas, je réfléchis encore…

Je n'ai rien à changer dans ma famille, parce qu’on s’aime et qu’on s’entraide, je peux compter sur eux et je sais que j’ai de la chance.




Texte de Mamadou K.

 Texte audio par Mamadou

Je suis Mamadou.
Je viens du village de Kaimpo, au Mali.
C’est au dessus de Bamako, mais il faut une journée de voiture pour rejoindre mon village natal.

Je suis né dans une famille nombreuse. J’ai huit frères et soeurs. J’ai passé beaucoup de temps avec les hommes de ma famille. Avec mon grand-père, mon oncle, mon père, mes frères, on construisait des outils pour fabriquer des portes.
Fabriquer des portes, c’est créer des endroits de passage là où avant il y avait un mur.

Avec ma mère, je me rappelle qu’elle me racontait des histoires sur l’origine et les traditions de mon village. Avec ma mère, je me rappelle aussi qu’il valait mieux pas la contrarier, mais c’est une autre histoire.
Dans mon village, dans ma famille, lors des repas, on partageait tout dans une énorme calebasse.
Ici, c’est pas vraiment pareil.

Qui je suis, ici, aujourd’hui ?
Toujours le même, un peu plus grand, un peu plus fort.
J’ai fait un grand voyage pour arriver jusqu’ici. J’ai rencontré des murs, des portes souvent fermées, mais je suis prêt à tout pour les ouvrir.
J’ai appris de toutes mes expériences, et je préfère les voir comme des surprises que comme des épreuves…

Tu peux me dire tout ce que tu veux, je n’écouterai pas, je ne connais bien une chose qu’en m’y frottant directement, je n’apprends que par mes expériences.

Ce que je souhaite ?
Ne pas être seul, c’est important pour moi la communauté, la famille, les amis, le lycée…
C’est pour ça que j’aime le foot, courir tout seul ne m’intéresse pas, être actif dans une équipe, pouvoir compter les uns sur les autres pour arriver plus loin ensemble.

Une citation que j’aime bien c’est :
« Tout ce que tu fais aura des effets »
J’ai appris ça le jour où j’ai décidé de partir de mon village, sans prévenir personne, je savais que mes parents m’en empêcheraient.
Je suis revenu quinze jour après et… j’ai connu la fureur de ma mère !
Elle était tellement inquiète que je ne me souviens même plus du nombre de coups qu’elle m’a donné, elle m’a même enfermé une semaine à la maison pour que je ne sorte plus.
« Tout ce que tu fais aura des effets »
Toute action a une conséquence, réfléchis bien quand tu prends une décision et … fais attention à ta mère !


 


Texte de Modibo

 Texte audio par Modibo

La mort - Salut Modibo.

Modibo - Qu’est ce que tu fais là ?

La mort - Je suis venu te voir.

Modibo - Tu es venu me chercher ?

La mort - Non, je suis venu te voir, tu as des choses à me dire ?

Modibo - … Oui, tu pourrais arrêter d’emmener mes amis ?
Où ils sont d’ailleurs ?
Où on va quand on meurt ?

(La mort ne répond pas)

Modibo - Pourquoi la vie ne dit pas ce qu’elle coûte ?
Pourquoi on a beau tuer le temps et c’est le temps qui nous enterre tous ?
Le temps est insuffisant.
Pourquoi tu ne nous laisses pas plus de temps ?

(La mort ne répond pas)

Modibo - Est-ce qu’il existe un paradis ?

(La mort ne répond pas)

Modibo - Tu réponds pas ! Mais à quoi ça sert de venir me voir si tu réponds pas à mes questions ?

La mort - Tu as d’autres questions ?

Modibo - Je veux des réponses !
Comment vivre en sachant que tu existes ?
Comment supporter la mort des autres ?
J’ai perdu tellement de proches, j’ai l’impression de mourir mille fois

La mort - Qu’est-ce que tu voudrais que je te dise ?

Modibo - Laisse-moi croire qu’un « au revoir » ne me sépare jamais de mes proches

La mort (fait un petit signe de tête) - Alors, au revoir…




Texte de Morgane

 Texte audio par Morgane

Je me réveille, j’ai faim, je prends une poche de sang dans mon frigo. J’ai une réserve : je les vole à l’hôpital du Val d’Yerres, une clinique privée à côté de chez moi.
Il faut que j’aille en cours, je passe en mode humain.
Je déteste le soleil mais je suis entre la vie et la mort et le jour, il faut vivre.

Je passe devant le centre commercial, des centaines de personnes viennent y dépenser leur argent alors que d’autres ne peuvent rien s’offrir. Ça me dégoûte qu’en 2020 il y ait encore beaucoup de personnes dans le besoin et que d’autres consomment sans s’arrêter…
De quoi ont-ils besoin ?
Tous ces vêtements, ce maquillage, ces chaussures, ces bijoux…
Ils se cachent et s’enterrent en dessous…
Moi aussi je me cache et je m’enterre mais pas pour les mêmes raisons.
Je suis un vampire, la nuit, la terre et le cercueil sont ma maison.

J’arrive au lycée.
Je suis en menuiserie.
J’aime le bois.
En ce moment, je construis un cercueil. J’ai demandé à faire ce projet pour valider mon diplôme. Les professeurs n’ont rien soupçonné. Je vais l’assembler avec du hêtre et du chêne et le faire assez large pour pouvoir m’y retourner et avec assez de profondeur pour conserver le froid.

Je suis bien dans ma classe, dans le lycée personne ne m’embête, je fais mon chemin. Quand je sors, je vois des personnes agressives qui s’amusent à harceler les autres, les injurier, les insulter. Ça m’écœure, qu’est-ce que ça leur apporte toute cette haine ? Qu’est-ce que ça peut apporter de faire souffrir quelqu’un ?
Je voudrais les mordre.
Mais j’ai une autre idée.
Je vais plutôt leur montrer ce qu’ils font subir aux autres.
La nuit, je me glisse dans leur chambre, je sors mes crocs et je les terrorise.
Je ne les fais pas souffrir par plaisir, mais par justice. Je suis un vampire et je me donne ce droit.
J’ai des capacités surnaturelles, des pouvoirs merveilleux.

Un jour, un ami à moi est tombé malade, gravement, subitement…
Les médecins ont dit qu’il allait mourir.
Pour moi, la mort n’est pas une fin.
Je lui ai dit que je pouvais le sauver et il a dit oui, sans hésiter…
Je l’ai embrassé et lui ai donné l’immortalité.

J’ai parfois peur de vivre trop longtemps. Peur de perdre des personnes que j’aime, de voir les époques se répéter et les guerres continuer. Mais ça me donne aussi l’éternité pour améliorer et participer à la construction d’un monde d’équilibre entre la lumière et l’obscurité…




Texte de Patou

 Texte audio par Patou et Rahim

La liberté pour moi, c’est aller où je veux.
Passer simplement d’un pays à un autre,
Barcelone, Kinshasa, Dubaï, les États-Unis, le Brésil et… la Suisse !
Avoir des ailes à la place des pieds : pratique pour le football.

La famille c’est l’endroit où je suis en sécurité.
Si mes proches n’étaient pas là, je ne pourrais pas vivre.
Ça forge aussi l’esprit d’équipe : pratique pour le football.

Je ne voulais pas vraiment faire de la menuiserie, les copeaux de bois te rentrent dans les yeux, tu peux te couper des doigts.
J’aimerais plutôt me former à l’électricité, c’est plus précis, et puis l’électricité c’est une énergie et avoir de l’énergie c’est pratique pour le football.

Je ne comprends pas les gens qui volent, ça m’énerve, je trouve ça violent de voler quelqu’un.
La violence, je l’utilise parfois pour me défendre, j’attaque quand il faut, je choisis le bon moment et c’est pratique pour le football.




Texte de Rahim

 Texte audio par Patou et Rahim

Je suis né sur un ballon de foot.

(dribble) Je suis très très rapide, je cours.
Je suis un bon observateur, je réagis vite et, plus je pratique, plus je m’améliore :
Rigueur, Travail, compétence.

(pause) Je déteste perdre, quand je sens que mon équipe perd, je pourrais pleurer.

(dribble) J’aime bien les histoires, mais je préfère quand elles sont fantastiques plutôt que quand elles parlent de la réalité.
J’aime bien savoir ce qui se passe dans le monde, mais pas toujours
Je préfère les couleurs au noir et blanc

(pause) Je ne veux pas rater ma vie, c’est-à-dire, ne rien faire de ma vie

Ce qui me révolte ?
L’agressivité de certains policiers, ils abusent de leur autorité. Une fois je me suis fait insulter sans raison, l’un d’entre eux m’a dit « Casse-toi de là ». Je me suis senti moins que rien, comme si j’avais pas le droit d’exister. Je mérite pas qu’on me dise ça. La faim dans le monde aussi. Les États ne font rien pour aider les gens à sortir de la misère, mais ça ne les intéresse pas, les pauvres ne les rendent pas plus riches.

(dribble) Par contre, certains joueurs de foot aident des personnes dans le besoin. Blaise Matudi développe des projets au Congo, construit des écoles, des hôpitaux. Ou bien Macambi à l’Olympique Lyonnais, il a fait la même chose au Kenya.

(Pause) On critique le football parce qu’on achète des joueurs avec des sommes incroyables, mais de nombreux joueurs viennent de la rue, c’est un sport qui permet à plein de personnes de changer leur histoire et d’aider les autres après…



Ce projet a été mené avec des élèves du Lycée Auguste Perret à Évry-Courcouronnes et avec une équipe enseignante constituée de : Armelle Chéenne, Frédéric Moreau, Sandrine Stoikovitch, Nathalie Barral, Caroline Hernandez et Marie Ponchot.
Il fait partie d’un projet global impliquant également le Lycée des Métiers Charles Baudelaire (Évry-Courcouronnes), le Lycée Polyvalent Georges Brassens (Évry-Courcouronnes) et le Lycée François Truffaut (Bondoufle).

Les partenaires

Action financée par la Région île-de-France, l’Académie de Versailles et la Scène nationale de l’Essonne




 

Les artistes

Lucile Beaune, écriture des textes
www.cie-index.com 

Florence Garcia, construction des masques
www.florencegarcia-book.com

Laura Fedida, construction des masques